LA NUMISMATIQUE EN DEODATIE

LES MONNAIES GAULOISES ET ROMAINES

 

Les trésors monétaires de Robache

Un premier trésor monétaire a été mis au jour à Robache, hameau de la commune de Saint-Dié-des-Vosges en 1770. Il s'agit d'un grand nombre (mais on ne sait pas exactement combien) de médailles romaines consulaires en argent, appelées nummi serrati, frappées sous la république romaine. « Ces médailles d'argent étaient la seule monnaie étrangère que les gaulois acceptaient parce qu’elles avaient un meilleur aloi que les autres » (Nicolas-François Gravier). Le trésor est découvert à Robache, mais on ne sait pas avec précision, à quel endroit exact furent trouvées ces pièces, ni ce qu'elles sont devenues, aucune description, aucun inventaire, aucun dessin n’ont été réalisés.

Les plus anciennes, appelées denarii serrati, ne seraient pas antérieures à 104 après Jésus Christ.  Donc on peut dater ce 1er trésor, constitué de médailles d'argent romaines, du 2e siècle après Jésus Christ.

Un 2e trésor aurait été découvert en 1826, il est signalé par Lepage et Charton, mais l’information n’est pas reprise par les numismates, là encore il n’existe aucune description, aucun inventaire, aucun dessin. Tout ceci fait penser qu’il s’agit d’une erreur de date.

Le 3e trésor est le plus documenté. Il est découvert le 26 juin 1844 à Robache (village à 4 kms au nord de Saint-Dié-des-Vosges), d’environ 3 000 pièces d'argent gauloises dont la grande majorité sont des “KALETEDOY“. (lire kalétédou), est le plus grand trésor connu de ce type de monnaies.

La frappe de celles-ci se situe à la 1ère moitié du 1er siècle avant J.C., lors des grands événements historiques que connut la Gaule, pendant les dernières années de l'indépendance gauloise et la conquête romaine.

Le trésor fut découvert à Robache, près du ruisseau, aucune localisation plus précise n'est possible car aucune autre information n'existe à ce sujet, les archives municipales de la ville de Saint-Dié ayant disparu cent ans plus tard, dans l'incendie de 1944.

Le nombre exact de pièces n'est pas connu, et aucune source, même parmi les plus contemporaines de la trouvaille, n'est précise à ce sujet.

Les auteurs de la découverte ont aussitôt partagé ce trésor, et ont probablement préféré rester discrets sur son importance. La dispersion, c'est-à-dire la revente des monnaies fut très rapide, car deux à trois semaines plus tard les monnaies circulaient déjà.

Sur les 2 500 à 3 000 monnaies, on en connaît aujourd’hui moins de 10 %. Et dans ce petit échantillon de 10 %, il y a presque 95 % de “KALETEDOY“. À condition de considérer cet échantillon comme représentatif, ce qui est assez probable, on peut extrapoler ces 95 % de “KALETEDOY“ à l'ensemble du trésor.

C'est dans le trésor de Robache qu'on découvre pour la première fois les monnaies "CONTE". Aucun exemplaire n'était connu jusqu'alors, et depuis elles ne sont retrouvées que dans très peu d’autres lieux.

Les pièces d'argent du trésor de Robache mesurent environ 13 millimètres de diamètre, pour un peu moins de 2 grammes.

À l’avers des “KALETEDOY“, c’est-à-dire le côté face, on remarque une tête casquée, dite tête de Rome. Ces monnaies sont en effet une imitation du denier romain, avec le X qui signifie dix.

Au revers, c’est-à-dire le côté pile, on remarque un cheval au centre, avec une inscription en périphérie. Le denier romain représentait un bige. L’inscription est en caractères grecs, elle est parfois complétée - sur quelques exemplaires non présents à Robache - du nom de “SULLA“ en lettres latines.

28 de ces monnaies sont conservées au musée Pierre Noël de Saint-Dié-des-Vosges, grâce à l’intervention de la Société Philomatique Vosgienne.

 

 

Pour en savoir plus

1 - Bulletin de la Société Philomatique>Vosgienne, format 18 x 23,5, 239 pages, « Trésors de la montagne vosgienne » Tome C, Saint-Dié, 1999. ( 77 pages sur le trésor de Robache )

2 - N° 4 de Mémoire des Vosges, format A4 80 pages, « Finances, monnaies & médailles »

3 - N°9 de Mémoire des Vosges 2004, pp. 33-34 et 54-55  Histoire du Trésor gaulois de Robache par Thierry Choserot, Claude Janel.

 

 

Brochure illustrée « Sur la piste du trésor gaulois de Robache », Petits personnages de type B.D, histoire de la monnaie : origine, fabrication, développement... Histoire de la Lorraine antique à travers la monnaie... Sur la base de l’histoire du trésor de Robache, avec jeux, questions, format A4, 48 pages, 2002.

 

Les monnaies de La Bure

 Le site de La Bure présente une richesse monétaire qui témoigne d'un rôle important au moins économique si ce n’est politique du lieu ou pour une autre raison qui reste à définir. Il a en effet livré au cours des fouilles un nombre élevé et inhabituel, de monnaies pour ce type de site, soit 340 gauloises et 923 romaines. Jacques Grelu identifie 923 soit 743 et 180 frustes (trop abîmées). Karine Boulanger identifie 797 romaines (Boulanger, 1997, p. 71). Parmi les gauloises figure une majorité très nette de potins au sanglier, soit 256 potins au sanglier sur un total de 302 potins. Le reste des monnaies gauloises se répartit en 35 quinaires en argent, 1 illisible, 1 incertaine, 1 bronze. (Bigoni, 2007-2008, p. 26).

Ceci est à comparer avec le site de la Pierre d’Appel distant de 7 km et occupé sensiblement à la même époque et à peine plus petit, avec seulement 17 monnaies dont 13 gauloises, où pourtant Alain Deyber pense avoir trouvé des indices d’un atelier monétaire (Deyber, 2003, pp. 131-132), la discordance entre les deux sites pose question.

La Société Philomatique Vosgienne a largement publié les trouvailles de ces monnaies dans ses  rapports de fouilles, qui sont toujours disponibles (nous demander) : Tronquart Georges et coll., «Rapports de fouilles sur le camp celtique de La Bure», Bulletin SPV, du tome [LXVIII,1965] au [XC,1987].

Il existe aussi plusieurs articles de synthèse :

Grelu Jacques, Tronquart Georges, Les monnaies romaines du camp celtique de La Bure (Vosges), Bulletin SPV,  [tome XCVIII, 121e année, 1995-96], pp. 25 à 67.

Grelu Jacques, Les monnaies romaines de la Bure, les copies du numéraire impérial en question, Mémoire des Vosges H.S.C. n° 4, 2002, pp. 25 à 30.

Bigoni Rose, Les monnaies gauloises du site de hauteur fortifié de la Bure (Saint-Dié-des-Vosges, 88) in : Le «Camp celtique» de La Bure à Saint-Dié (1964 - 2015), Mémoire des Vosges, hors série n°7, 2016, 128 p.

Manisse Pierre-Damien,  Des monnaies romaines du Camp de la Bure (88) : récolement et distribution spatiale, in : Le «Camp celtique» de La Bure à Saint-Dié (1964 - 2015), Mémoire des Vosges, hors série n°7, 2016, 128 p.

Potin au sanglier

 
     

 

                 

 

       Monnaies d’argent de type “KALETEDOY“ de La Bure

 

 

 

 LE MONNAYAGE À SAINT-DIÉ

 

 La première monnaie du chapitre de Saint-Dié (1020-1170)

Un denier à la légende SA/-DIED// qui faisait partie du trésor de Thionville décrit par Quintard est identique au denier au temple de l’évêque de Metz Thierry II de Luxembourg (1005-1047). Quintard l’attribuait au duc de Mosellane Thierry Ier (978-1028). La légende partielle du revers DEOD peut fournir DEODericus comme DEODatus est en fait une monnaie du chapitre. Ce denier de type purement épiscopal du début du 11e siècle, sans référence à l’empereur doit être rendu au chapitre de Saint-Dié. Cette monnaie serait la première  frappée à Saint-Dié...

 

 Première mention du denier déodatien

 In Nomine Sanctae & individuae Trinitatis. Ego Ermengardis ingenuis exorta natalibus intelligens quoniam summa ingenuitas, ipsa est in quâ qua servitus Christi comprobatur, servisque Dei famulatus exhibetur , ad sacrum piissimi Confessoris Christi Deodati corpus cum devotionis affectu, veniens, eumque apud Deum advocatum habere desiderans, cicinno cincinno capitis mei super altare posito, meipsam cum omnis generis mei posteritate servitio ipsius sponte subjecti, eam de stirpe meâ mea nascituris indicem conditionem, ut in die natali ipsius Beati Deodati per singulos annos ad emendum cereum, vir quidem duos denarios Deodatensis monetae, mulier autem unum conferat. Quicumque vero longe, vel prope positus ,praedictum censum die praenominatâ praenominata, seu duobus proxime sequentibus dare, vel mittere neglexerit, reus deinceps habebitur, & ad satisfactionem vocatus cum censu ipso poenam parem censui, id est vir duos nummos, mulier unum, persolvet. Si autem contumaciter agens contempferit, anathematis vinculo ligabitur, & demum juxta communem aliorum servorum legem per Ecclesiae Advocatum plenariè plenarie satisfacere cogetur. De ipsis quoque contribulibus, unus statuetur, qui & colligendis censibus praesit, & cereo faciendo, quo innovato, si quid in cerâ cera, seu nummis superfuerit in usus Ecclesiae de Canonicorum arbotrio deputabitur.

 Actum anno incarnationis Dominicae, millesimo quinquagesimo prim, pontificante Leone Papâ Papa nono, imperante Henrico tertio, Duce Gerardo

 Au nom de la Sainte et Indivisible Trinité. Moi, née libre de la famille des Ermengarde, comprenant que la condition suprême est celle par laquelle est avérée la sujétion au Christ et que le service de Dieu est entretenu par ses sujets, mue par un sentiment de dévotion pour le corps sacré de Déodat très pieux Confesseur du Christ et désirant qu’il intercède pour moi auprès de Dieu, je me présente, tête et cheveux inclinés sur son autel, soumise de mon plein gré à son service avec toute la descendance de ma race, officialisant cette fondation pour ceux qui naîtront de mon sang afin que, pour acheter un cierge de cire le jour de la naissance du Bienheureux Déodat, chaque homme verse deux deniers en monnaie déodatienne mais un seul pour une femme. Quiconque, dans un temps éloigné ou proche, aura négligé soit de [les] donner dans les deux jours suivants immédiatement soit d’envoyer le cens prescrit au jour indiqué, ce débiteur sera invité et tenu par la suite de s’acquitter d’une amende d’un montant égal à celui du cens ; c’est-à-dire que l’homme versera deux écus et la femme un. Mais si le débiteur s’obstine dans ses agissements, il sera lié par le lien de l’excommunication et enfin il sera contraint par l’avoué de l’Eglise de satisfaire à la loi en présence de la communauté des autres serviteurs. Pour ce qui est aussi des membres de cette assemblée, l’un d’entre eux sera établi pour diriger la collecte des cens et la fabrication du cierge ; et une fois le cierge renouvelé, s’il est resté quelque chose des écus dus pour la cire, ce reliquat sera imputé sur les besoins de l’Eglise à la suite d’une décision des chanoines.

 Fait l’an de l’incarnation du Seigneur mil cinquante au début, pendant le pontificat du pape Léon IX, l’empereur étant Henri trois et le duc [de Lorraine], Gérard.  (Trad. J-C Diedler)

 Pour en savoir plus : Jean Mottin, Les deniers de Saint-Dié du 11e au 14e siècle, 2003, 17 p.   

 (Memoire des vosges hors série N°1)         

et d'autres articles dans : Nos Publications

 

La première mention d’un denier déodatien date de 1050.  La précision de  cette date peut masquer une réalité : à Saint-Dié, les recherches numismatiques sont difficiles. Les monnaies sont rares, les droits monétaires nombreux et les documents précis inexistants.

 Il faut bien toutes les connaissances de Jean Mottin pour parvenir à présenter un tableau aussi exhaustif des monnaies déodatiennes. L’article devrait autant intéresser les spécialistes que les profanes en la matière.

 

 

 

 

Un atelier monétaire à Etival au 12e siècle

 Les recherches patientes et passionnées de Jean Mottin lui ont permis de découvrir des monnaies d’un atelier monétaire vosgien inconnu jusqu’à ce jour. Cette découverte est sans doute la plus importante en numismatique lorraine depuis Robert et De Saulcy. Dans cet article confié à la Société Philomatique, Jean Mottin nous livre le fruit de son travail. On ne connait à ce jour que 3 deniers et 4 oboles parfaitement identifiés d’Etival qui dateraient de la première moitié du 12e siècle.

L’avers des monnaies d’ETIVAL représente un temple particulier très différent du temple carolingien. Le toit du temple est en encorbellement sur un corps de bâtiment à trois colonnes. Ce temple qui ne peut être réalisé qu’en bois, Laurent l’a baptisé le « temple de bois »# 1. Le type monétaire au « temple de bois » est rare en lorraine et n’est connu dans les Vosges qu’à Epinal et hors des Vosges à Nancy et Vic sur Seille. Les légendes de l’avers des deniers d’Epinal au « temple de bois » donnent soit SVMON DVX pour le duc Simon 1er (1115-1139) soit STEFANVS pour Etienne de Bar Evêque de Metz (1120-1165). Ces deux deniers d’Epinal fixent l’émission des deniers d’Etival entre 1115 et 1165...

 

Pour en savoir plus : Jean Mottin , Etival, un nouvel atelier monétaire vosgien de la première moitié du 12e siècle,  Mémoire des Vosges n°32, pp. 71-73.

 

AUTRES MONNAIES ET MEDAILLES

 

 La Société Philomatique a publié différents articles qui pourraient intéresser numismates et collectionneurs, voici la bibliographie  des « Monnaies et médailles » extraite des tables alphabétiques détaillées de la Société Philomatique Vosgienne de 1875 à 2010.

(pour vous procurer les tables complètes, voir la rubrique "autres publications")

      Abréviations

   Anciens bulletins : Les chiffres romains indiquent le volume et les chiffres arabes la page.

MDV : Mémoire des Vosges, fait suite au Bulletin, depuis 2000, dépouillé des N° 1 à 20 (+ livraisons supplémentaires).

 Monnaies antiques. Romaines, trouvées à St-Dié et viii, p. 35, 36. – De La Bure, voy. Références principales en italique sous Bure. – Trésor de Robache, lix, p. 96. et « Trésors de la montagne vosgienne » Tome C, 1999. (77 pages sur le trésor de Robache ) … antiques de la Pierre d’Appel, lxxv, p. 24, 25. – Voy. aussi, Bibracte - Blanchet, Colbert, La Tour - Kaletedou, Mediomatriques. – Divers : Nicolas Briot, inventeur du balancier, lx, p. 46 ; pièces d’or du 15e s. trouvées à l’emplacement du nouvel hôtel-de-ville, lxi, p. 79. – Voy. Archéologie (années 1880 ; 1882-83 ; 1914-24 ; 1967 ; 1978 ; 1982 (exposition) ; 1991 ; MDV 10, p. 35, 36). Les monnaies en circulation à St-Dié du 11e au 15e s, MDV 4, p. 6 à 9. – L’âme de la … métallique et son contrôle drastique par l’autorité, MDV 4, p. 23, 24. – Les … romaines de La Bure et la politique monétaire de l’Empire, MDV 4, p. 25 à 30.

 Monnaies. … du Moyen Âge trouvées près de Fouday, au Ban-de-la-Roche (Vosges-Alsace), vi, p. 59 à 70, pl. – De St-Dié, viii, p. 75 à 79, 84, 85, fig. ; x, p. 163 à 165 ; xi, p. 240, 243. – Les premières monnaies de Remiremont, xvii, p. 339 à 342. – Leur valeur relativement aux denrées à Gérardmer au 18e s, xix, p. 94 à 96. – A Badonviller, xix, p. 308. Voy. Milan (Italie)… trouvées entre Raon et Etival : demi-follis byzantin (641) et … de bronze à l’autel funéraire Consecrato (276-280), MDV 11, p. 6 à 8.

 Monnaies gauloises. Description de six d’entre elles provenant de la trouvaille de Robache, xli, p. 29 à 33, 6 fig. – L’Atlas de monnaies antiques de La Tour,lxxvi, p. 27. Voy. Mediomatriques (Cité), Triboques.

Histoire du Trésor de Robache, MDV 9, p. 33, 34 et 54. –Lions et taureaux sur les monnaies gallo-romaines, MDV 17, p. 19, fig. Voy. Quinaires.

 Monnayage. A St-Dié, au 11e s, MDV suppl. 1 (2003), p. 3 à 12. – A Rambervillers, au 14e s, MDV 12, p. 36, fig.

 Médailles. De Duvivier et Leblanc, xx, p. 276 à 279. – M commémorative en bronze des cloches de l’église St-Martin, lxv, p. 54, 55. – A l’effigie de St-Romaric, lxxiii, p. 34, 65.

M commémorative de l’érection de l’Evêché de St-Dié en 1777, MDV 4, p. 31 à 33. – Quelques M commémoratives sous la 3e République à St-Dié, MDV 4, p. 34 à 37. – M commémoratives festives aux 19e-20e s, à St-Dié, MDV 9, p. 29 à 32, photos (détails : concours de musique, inaugurations statue de Jules Ferry, fêtes franco-américaines, consécration de la cathédrale).

 

Médaille commémorative de l’érection de l’Evêché de St-Dié en 1777